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La saga de “l’Affaire Apavou”

[Rédaction] Cette affaire sera-t-elle un des symboles d’une dérive grave et inacceptable sur laquelle le Garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, serait intervenu ? En effet, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de La Réunion serait le théâtre de pratiques et de liaisons douteuses remises en cause par les avocats de Armand Apavou, dénoncées également par l’association Aide Entreprise OSDEI dans la cadre de l’instance de dialogue dite la “Commission Waserman”, et auxquelles se prêteraient deux mandataires judiciaires en charge de la liquidation d’une des plus grandes entreprises locales, le Groupe Apavou.

Les tribunaux de commerce avec leurs administrateurs judiciaires et mandataires liquidateurs avaient plutôt bonne presse depuis l’analyse qu’en avait faite Arnaud Montebourg, ex-avocat devenu ministre qui avait dénoncé des dérives.

En 2017, le livre éclairant de Nicolas Faguier, « Tribunaux de commerce, L’euthanasie économique », avait déjà sonné l’alarme sur certaines dérives. Montpellier s’est récemment éclairé d’un jour nouveau, aussi, grâce à son tribunal de commerce qui a laissé un patron reprendre sa boite après avoir planté 650 millions d’euros à des créanciers qui n’ont eu que leurs yeux pour pleurer.

Créé en 1965, le Groupe Apavou représente le principal promoteur immobilier de l’île.

Son fondateur Armand Apavou, est parvenu à constituer en 40 ans, un géant local de l’immobilier ayant notamment construit un parc d’environ25.000 logements et 150.000 m2 de locaux professionnels. Aujourd’hui, le Groupe Apavou regroupe une cinquantaine d’entreprises filiales, qui détiennent en particulier un patrimoine de 5 hôtels, de 2.522 logements, de nombreux locaux commerciaux et de multiples opérations de promotion immobilière.

Le groupe comptait jusqu’à un millier de salariés.

Les décisions prises par la direction entre 1983 et 1995, de construire 3.000 logements ILM (Immeuble à loyer modéré)et cela à la demande de l’État, ont progressivement fragilisé la santé financière du groupe. L’État cherchait alors une entreprise du BTP capable de réaliser ce type de logements à La Réunion et les bailleurs sociaux s’y refusaient compte tenu du montant des fonds propres à apporter.

Pour ce faire, seul le Groupe Apavou a accepté d’apporter 20% de fonds propres et a dû emprunter plus de 150 millions d’euros, par 41 prêts consentis par le Crédit Foncier de France. Le groupe est devenu le premier opérateur privé à développer ce type de logements.Or, le taux d’intérêt progressif de ces prêts se portant jusqu’à 10,50%a contribué à fragiliser les comptes et plonger sa foncière BLI et, par voie de conséquence les autres activités du groupe Apavou,dans une crise financière profonde pendant des années.

Finalement placées en redressement judiciaire fin 2016/début 2017, les principales sociétés du groupe n’ont pas réussi à présenter un plan de redressement pour combler leur passif. Les instances judiciaires de Saint-Denis ont in fine prononcé la liquidation judiciaire de la quasi-totalité des filiales majeures entre le 7 mars et le 22 août 2018.

La liquidation du groupe est intervenue dans un contexte de conflit judiciaire avec le Crédit Foncier. Le Groupe Apavou accuse en effet ce dernier d’avoir contribué à dégrader pendant de longues années sa situation financière dans son ensemble, notamment à cause des conditions de remboursement draconiennes des prêts, lesquelles ont entraîné la faillite de la quasi-totalité des sociétés du groupe.

Les liquidateurs ont également initié plusieurs procédures contre le Crédit Foncier, y compris au pénal, parallèlement à une action contre Armand Apavou pour banqueroute. Concernant cette action pour banqueroute, Armand Apavou et le Crédit Foncier ont finalement été relaxés par le tribunal correctionnel de Saint-Denis le 14 octobre 2019 et depuis l’affaire subit de multiples rebonds qui étrangement ne sont que peu ou prou relayés en France Métropole.

De plus, malgré une offre d’achat par CDC Habitat des 2.522 logements de la société BLI à hauteur de 148,5 M€ et de commerces de la société Batipro à hauteur de 8,1 M€, les mandataires liquidateurs ont eu la volonté farouche de poursuivre la procédure de liquidation coûte que coûte, alors même que la valeur des actifs du groupe permettait de régler la totalité des créanciers.

Au 31 juillet 2020, la société filiale BLI a d’ores et déjà cédé à CDC Habitat16des 20 résidences de logements de la société BLI pour plus de 142 millions d’euros. En additionnant la trésorerie disponible des filiales du groupe et le prix de cession global de 156,6 M€ versé par CDC Habitat au titre de logements et de commerces,ces liquidités conséquentes auraient dû permettre aux mandataires liquidateurs de désendetter le groupe dont le passif est d’environ 160 millions d’euros,pour envisager une voie « in bonis ». Or, les cessions intervenues n’ont rien changé à la marche forcée que les mandataires ont engagée et qui les conduit, contrairement à ce qui se pratique dans tout dossier, à refuser de nettoyer les créances entre sociétés du groupe Apavou afin de faire durer la procédure de liquidation et d’empêcher sa clôture. Les intérêts des sociétés restées « in bonis » du groupe, des société débitrices, des créanciers et de l’associé ultime, sont ainsi bafoués.

Par ailleurs, les avocats du Groupe Apavou se sont aperçus depuis la fin d’année 2019 que les mandataires liquidateurs ont eu recours à des intervenants (courtier en assurances, notaires, experts-comptables, cabinet d’affaires publiques et de communication) qui entretiennent des liens financiers et/ou personnels avec leurs avocats, voire avec eux-mêmes. C’est ainsi, à titre d’exemple, que l’un des mandataires a eu recours à un courtier en assurances qui n’est autre que son beau-frère avec lequel il est associé dans 2 SCI, pour résilier des assurances portant sur des immeubles du Groupe Apavou afin d’en souscrire de nouvelles avec la même compagnie d’assurance. Cette manœuvre uniquement destinée à permettre à son beau-frère de percevoir des commissions a d’ailleurs conduit à ce que ces immeubles ne soient pas assurés pendant plusieurs semaines, au détriment des créanciers qui sont pourtant censés être représentés par les mandataires.

Le 27 mai 2020, les avocats du Groupe Apavou ont en conséquence saisi le juge-commissaire du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis, d’une requête aux fins de remplacement des Co-Liquidateurs compte tenu : des graves fautes accomplies lors de leur mission, d’une prise illégale d’intérêts caractérisée en raison du fait que la Cour de cassation retient que les mandataires sont des personnes chargées d’une mission de service public, du défaut d’assurance d’immeubles au cours de la procédure et des liens financiers et/ou personnels entretenus directement ou indirectement avec divers intervenants de la procédure. Le tribunal est resté sourd à leur demande, alors qu’il avait l’obligation de statuer dans les meilleurs délais. Il a annoncé le 6 juillet 2020, que le délibéré serait finalement prorogé au 31 août prochain, accordant aux liquidateurs le temps nécessaire pour dépecer et mettre à mort le Groupe Apavou. Depuis la saga continue et promet des rebonds autant du côté des mandataires que des défenseurs du Groupe Apavou et des époux Apavou, mis en garde à vue en mars 2021.

Cette situation inique se déroule peut-être à 9.000 km de Paris, mais elle se joue en France.

Elle a donc heureusement éveillé les soupçons de l’association Aide Entreprise, qui a aussitôt saisi la #Commission #Waserman dirigée par Sylvain Waserman, Vice-Président de l’Assemblée Nationale, en charge de l’étude des dossiers qui caractérisent les dysfonctionnements de la justice commerciale dans le cadre des procédures collectives.

Le conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires (#CNAJMJ), bien qu’ayant été saisi en mars 2020 et convoqué les mandataires en question  le 08 juillet 2020,  était impuissant quant à écarter, au moins durant le temps des enquêtes qui semblent plus que nécessaires et fondées. La Chancellerie a donc été directement saisie.

A l’heure où les professions juridiques réglementées sont dans l’œil du cyclone suite aux révélations concernant l’ouverture le 12 juin 2020, d’une enquête préliminaire pour « prise illégale d’intérêts » visant notamment Patrick Sannino, président de la Chambre nationale des commissaires de justice.

Après les huissiers, Dupond-Moretti voit les mandataires dans ses dossiers. Des professions que son mentor et président Emmanuel Macron avait bien identifiées pour leurs rémunérations avec la loi éponyme. Il n’en avait pas vu les dérives.

Ainsi, l’association Aide Entreprise OSDEI, après avoir appliqué son nouveau protocole d’investigation en 12 étapes, le Protocole Vitale®,  auquel sont soumis obligatoirement tous ses adhérents depuis le 1er juin 2021 et qui vise à mener une enquête de fond sur les saisines qui lui sont soumises depuis 13 ans a remis son rapport à la Direction des Affaires Civiles et du Sceau qui lui a répondu qu’elle traiterait désormais le dossier.

Il semblerait que les mandataires, dont une des deux études est constituée du père et du fils, concernés par cette Affaire Apavou et de multiples autres réclamations, soient “partis à la retraite” : ce sont les propos reportés par l’antenne régionale OSDEI du sud-ouest de la France à la direction de l’association Aide Entreprise OSDEI et au Jedi.media …

Se pose cette question soulevée par Sylvain Waserman dans sa conférence du 17 mars 2022 d’une profession de fait “intouchable”, qui malgré les condamnations, peut continuer étonnamment à exercer…

A suivre…

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Une réflexion sur “ Effondrement de l’Empire Apavou

  1. Maitre Marie josée Rousselot liquidateur durant 14 ans sans tenue comptable coherente avec gestion de notre patrimoine sans aucun chiffre sans tva payée , sans bilan ou sont passé les fonds……
    demande au cde de reproduire sur une dette annulée inexistante et sur cette enorme production en profite pour demander un second RJ et une liquidation qu’elle obtient .
    alors qu’il n’yavait pas de dette les mandataires en gerant notre patrimoine ont “créée” 3 millions d’euros de dettes en plus de la disparition des recettes. Des fournisseurs passif anterieur seront payés !!! etc etc…

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